PARIS, 12 août 2018 (VCHR & BIIB) – La police et les autorités locales de Hué ont harcelé, intimidé et intercepté les membres du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse (MBJ, Gia Đình Phật từ Việt Nam) qui organisaient leur Camp d’été annuel à Huế. Cette nouvelle vague de répression contre le MBJ confirme les sérieux doutes qui existaient sur les droits des groupes religieux non-enregistrés, comme l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV) et son organisation pour la jeunesse, le MBJ, d’avoir des activités religieuses sous l’empire de la Loi sur les Croyances et la Religion.
Comme on le craignait, depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur les Croyances et la Religion en janvier 2018, les groupes religieux non-enregistrés sont devenus de plus en plus vulnérables. La loi ne considère que les groupes qui se sont enregistrés et ont obtenu la reconnaissance de l’État. Elle n’offre aucun cadre légal pour les activités des groupes religieux non-reconnus. Elle reprend par ailleurs le vocabulaire vague du Code pénal pour criminaliser les activités religieuses arbitrairement perçues comme « sapant la sécurité nationale », « nuisant à l’éthique sociale », « divisant les personnes suivant des croyances et des religions différentes », etc.. Selon de nouveaux décrets administratifs, les groupes religieux qui ont des activités sans avoir obtenu le certificat d’enregistrement prévu par la loi sont passibles d’amendes pouvant aller jusqu’à 30 millions de dongs (1130€) et des cadres chargés des questions religieuses ont été déployés dans tout le pays pour contrôler et punir ceux qui « violent la réglementation sur la religion ou les croyances ».
« Le Vietnam croit-il réellement qu’un camp d’été pour les enfants et les adolescents est une menace pour la sécurité nationale ? », s’est interrogé Võ Văn Ái, Président du VCHR et porte-parole international de l’EBUV. « La liberté de religion ou de conviction est un droit universel. L’enregistrement obligatoire constitue une violation de ce droit. Le Vietnam devrait mettre un terme à touts ces harcèlements et actes d’intimidation contre le MBJ, l’EBUV et tous les autres groupes religieux non-enregistrés, et leur permettre de conduire leurs activités religieuses et légitimes en paix ».
Le Camp « Dũng – Hiếu – Hạnh » du MBJ s’est tenu le 31 juillet 2018 dans la Pagode de l’EBUV Long Quang à Hué. Auparavant, il se tenait trois camps séparés en fonction des tranches d’âge des enfants, mais à cause de l’aggravation des harcèlements policiers et des menaces contre les enfants, le MBJ a décidé de les combiner cette année en un événement unique. Les Camps se tiennent à l’occasion du festival en l’honneur du Bodhisattva de la Compassion (Quán Thế Âm), pendant la retraite d’été des bonzes et nonnes. C’est un événement attendu par les jeunes Bouddhistes de l’EBUV qui viennent alors de toute la province et travaillent dur pour préparer les activités éducatives et culturelles. Les camps d’été sont une cible récurrente de la répression policière, mais cette année, la police s’est montrée particulièrement dure.
Plusieurs jours avant l’événement, les policiers se sont rendus chez les Bouddhistes à Hương Thủy, Phong Điền, Quảng Điền et Tả Ngạn Nội Thành (Huế), pour menacer les parents de représailles s’ils laissaient leurs enfants participer au Camp.
Les harcèlements et les interceptions par la police ont commencé dans toute la province dès 4h30 du matin, le 31 juillet, ont rapporté les sections du MBJ. A Lăng Cô, des cadres locaux, des policiers et des agents de la Sécurité sont arrivés à l’aube pour empêcher les enfants d’embarquer dans un bus et les ont dispersés de force. Un deuxième bus qui avait réussi s’échapper en empruntant une route différente a finalement été intercepté par la police. Dans le district de Nước Ngọt, à 5h00 du matin, les policiers ont encerclé le temple de l’EBUV, menacé et effrayé les enfants, et forcé les parents à les ramener chez eux. Les chefs du MBJ ont fermement protesté mais les policiers les ont repoussés sans ménagement.
À An Bằng, les policiers ont bloqué un bus plein d’enfants pendant plusieurs heures près du pont de Trường Hà sous prétexte d’un accident de la route, mais laissaient passer les autres véhicules. Le responsable du MBJ Văn Tiến Nhị a tenté de convaincre les policiers de le laisser passer mais a finalement été forcé de rebrousser chemin. Alerté de cet incident, un second bus venu de An Bằng a fait un détour par Quảng Trị pour finalement réussir à arriver à Huế en fin de matinée. Les sections du MBJ de An Dương, Hòa Đa Đông dans le district de Phú Vang, ont connu le même sort. Ses chefs Nguyễn Văn Đê et Lê Văn Thọ ont ainsi été forcés de renoncer et interdiction leur a été faite de se rendre à la « Pagode réactionnaire de Long Quang ».
Devant ces harcèlements arbitraires, les parents et les proches des membres du MBJ ont improvisé un réseau de transport, utilisant vélos, motocyclettes et voitures privées pour emmener les enfants au Camp d’été. Nombre des membres plus âgés du MBJ ont pu échapper à la police en abandonnant furtivement leur uniforme et en embarquant dans des bus pour Huế. En dépit des difficultés, un total de 360 jeunes du MBJ a réussi à rejoindre le Camp d’été. Les chefs du MBJ voient dans ce chiffre la preuve d’une répression policière bien plus grave que l’an passé où 435 membres avaient pu être présents.
Le 1er août, la police s’est rendue au domicile des organisateurs du Camp d’été Mai Tiến Sơn et Nguyễn Đức Khoa, les a insultés et agressés verbalement pour les pousser à couper tout lien avec l’EBUV et le MBJ. De nombreux autres responsables du MBJ ont rapporté qu’ils ont subi de pareils actes d’intimidation et de menace. Le chef du MBJ Lê Công Cầu a envoyé une lettre de protestation aux autorités municipales de Huế. Il a demandé au VCHR d’alerter la communauté internationale pour que soit condamnée une telle répression policière contre des activités pacifiques et légitimes.
Les membres du MBJ rendent visite au Patriarche de l’EBUV Thích Quảng Độ :
Le 3 août 2018, le Très Vénérable Thích Chí Viên, représentant de l’EBUV de la province de Khanh Hòa, a emmené un groupe de 40 membres du MBJ, enfants et adultes, rendre visite au Patriarche de l’EBUV Thích Quảng Độ dans son Monastère Zen Thanh Minh à Saigon. Le groupe a parcouru de nuit 500 km en bus depuis Nha Trang, arrivant à Saigon à 3h30 du matin. C’est la première fois qu’une si grande délégation a pu réussir à se rendre auprès du Patriarche de l’EBUV depuis qu’il a été placé en résidence surveillée. Thích Quảng Độ a été très touché par cette visite.
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Le Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse (Gia Đình Phật tử Việt Nam) est une organisation éducative non-reconnue fondée sur le modèle scout. Fondé en 1943 et affilié à l’EBUV, il compte 300.000 membres dans tout le pays. Sa devise est « Bi – Trí – Dũng faire » (Compassion, Sagesse, Courage)
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