PARIS, 9 mars 2017 (VCHR) – Le Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR) se félicite du Rapport annuel du Département d’État américain sur les droits de l’Homme portant sur l’année 2016 et rendu public le 3 mars 2017. Le chapitre de 58 pages sur le Vietnam juge très sévèrement la situation des droits de l’Homme dans ce pays, rendant compte de violations généralisées des droits humains et de « graves restrictions gouvernementales » sur les droits civils et politiques des citoyens vietnamiens.
Le rapport liste des violations comme « des arrestations et détentions arbitraires ; des mauvais traitements continuels de la police contre les suspects lors de leur arrestation et de leur détention, et le déni du droit à un procès équitable et prompt ». En 2016, « le système judiciaire [du Vietnam] était opaque et manquait de transparence », note le rapport, « le gouvernement a limité la liberté d’expression et réprimé la dissidence ; contrôlé et censuré la presse ; restreint la liberté sur internet et la liberté de religion ; maintenu une surveillance pesante et récurrente sur les militants » et « restreint les visites des ONG des droits de l’Homme et des agences de presse étrangères qui refusaient la supervision du gouvernement ».
« Le rapport du Département d’État américain confirme notre analyse qui fait de 2016 une année noire pour les droits de l’Homme au Vietnam », a dit le Président du VCHR Võ Văn Ái. « Cette tendance alarmante se confirme en 2017 avec une répression frénétique de la part du gouvernement contre les libertés d’expression, d’assemblée pacifique et de religion ou de croyance ».
Le VCHR regrette toutefois que le Département d’État n’ait fait aucune mention du sort de l’un des plus célèbres dissidents, le Très Vénérable Thích Quảng Độ (89 ans), Patriarche de l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam (EBUV). Il ne se trouve même pas sur la liste du Département d’État des dissidents politiques soumis à des restrictions de mouvement dans le pays. Pourtant Thích Quảng Độ, actuellement assigné à résidence au Monastère Zen Thanh Minh à Ho Chi Minh Ville, est en détention (en prison, exil intérieur ou résidence surveillée) depuis plus de trois décennies.
Le VCHR est conscient que les questions de liberté religieuse ne sont pas couvertes par le Rapport annuel mais relèvent d’un rapport séparé du Bureau de la Liberté Religieuse Internationale du Département d’État. Cependant, Thích Quảng Độ n’est pas seulement victime d’atteintes à la liberté religieuse. Alors qu’aucune charge formelle n’est retenue contre lui, il est de fait un prisonnier dans son propre monastère. Il est sous la surveillance constante de la police, ses mouvements sont restreints, ses communications contrôlées et ses visites sont approuvées ou non par la police dont une antenne se trouve de l’autre côté de la rue. Si le gouvernement autorise les délégations diplomatiques à le rencontrer, la police locale intimide fréquemment les Bouddhistes vietnamiens pour qu’ils ne rencontrent pas Thích Quảng Độ car il serait un « criminel ». Thích Quảng Độ a toujours demandé aux autorités de produire la justification officielle de son assignation et les charges qui la motivent, mais celles-ci s’y refusent systématiquement, prétextant d’« ordres oraux » venus « d’en-haut ».
Le VCHR s’inquiète de ce que les diplomates américains aient pu être influencés par les Ministères vietnamiens de la Sécurité Publique et des Affaires étrangères qui ne cessent de répéter que Thích Quảng Độ n’est pas en résidence surveillée. Ils prétendent en effet qu’il est « libre » et qu’il peut se rendre où il veut, mais que, tout simplement, il ne veut pas voyager. Le VCHR déclare solennellement que ce n’est pas vrai et en appelle aux États-Unis d’Amérique et à toutes les représentations diplomatiques au Vietnam de voir au delà de ce discours trompeur.
En réalité, ces derniers mois, Thích Quảng Độ a effectivement décliné un certain nombre d’offres de déplacements hors de son monastère, non parce qu’il ne voulait pas voyager mais parce qu’il savait qu’elles étaient motivées par la volonté de le placer sous le contrôle absolu de l’État. Tout d’abord, un proche ne cesse d’insister pour l’emmener dans le nord du Vietnam pour qu’il s’occupe du temple ancestral de la lignée. Thích Quảng Độ a compris que s’il acceptait, il ne pourrait jamais plus revenir. Par ailleurs, le Vénérable Thích Thanh Phong, figure influente de l’Église bouddhique d’État (Sangha Bouddhiste du Vietnam, SBV) au sud du pays, fait pression sur Thích Quảng Độ pour qu’il vienne vivre à la Pagode Vĩnh Nghiêm, un des principaux centres du SBV à Ho Chi Minh Ville. Thích Quảng Độ qui a dévoué sa vie à la liberté religieuse et au droit à l’existence de l’EBUV (interdite de fait en 1981), a dit qu’il ne trahirait jamais son engagement, et encore moins pour aller vivre dans une cage dorée sous le contrôle du SBV.
Par ailleurs, en prévision de la visite du Président Barack Obama au Vietnam, l’an dernier, l’ambassadeur américain Ted Osius avait invité Thích Quảng Độ à le rencontrer dans un salon de thé de Ho Chi Minh Ville. Thích Quảng Độ a expliqué au président du VCHR Võ Văn Ái qu’il appréciait la bonne volonté de l’ambassadeur américain mais qu’il avait dû refuser cette invitation car il savait que le régime de Hanoi ne pourrait pas s’opposer à une telle rencontre mais s’en servirait pour donner l’impression qu’il est libre, ce qui n’est pas le cas.
Le VCHR en appelle à toutes les représentations diplomatiques étrangères au Vietnam pour qu’elles surveillent étroitement la situation de Thích Quảng Độ et prennent la mesure des intenses pressions psychologiques et restrictions physiques qu’il endure. Nous vous demandons de façon urgente de faire pression sur le Vietnam pour rétablir le statut légal de l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam, lever officiellement toutes les restrictions sur Thích Quảng Độ et déclarer publiquement sa libération pleine et inconditionnelle, afin qu’il puisse vivre ses dernières années en liberté, entouré des nombreux disciples et amis.
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