GENÈVE, le 15 mars 2017 (VCHR) – Au nom d’Agir ensemble pour les Droits de l’Homme, le Président du Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme Võ Văn Ái a dénoncé devant le Conseil des Droits de l’Homme de l’ONU la nouvelle loi sur les croyances et la religion et le traitement des prisonniers religieux au Vietnam.

M. Võ Văn Ái a critiqué la toute première loi sur les croyances et la religion, adopté au Vietnam en novembre 2016 comme violant l’article 18 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques sur la liberté de religion ou de croyance car « soit les religions s’enregistrent et jouissent d’une liberté religieuse complètement encadrée par l’État-Parti, soit elles refusent de s’enregistrer et sont brutalement réprimées ». En réalité, avec cette loi, les religions doivent demander l’autorisation de jouir d’une liberté religieuse, qui est en outre extrêmement restreinte, ce qui est en contradiction avec le droit international pour lequel cette liberté ne peut dépendre d’un quelconque système d’autorisation.

M. Võ Văn Ái s’exprimant aujourd’hui devant le Conseil des Droits de l’Homme

M. Võ Văn Ái s’exprimant aujourd’hui devant le Conseil des Droits de l’Homme

« Plus qu’un progrès pour l’État de droit et la liberté religieuse, cette loi n’est qu’une brique de plus de l’arsenal que se concocte le régime pour donner un vernis de légalité à la répression religieuse au Vietnam », a dit Võ Văn Ái en marge du Conseil des Droits de l’Homme. « Cette loi n’est pas encore en vigueur, mais nous assistons déjà à une recrudescence des persécutions religieuses qui atteint des sommets de sauvagerie ».

Dans son allocution, M. Ái a ainsi présenté au Conseil des Droits de l’Homme les cas de 3 prisonniers religieux de longue durée dont l’état de santé se détériore gravement du fait des conditions de leur détention arbitraire :

Le bonze bouddhiste Thích Quảng Độ (89 ans, Patriarche de l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam) est détenu pratiquement sans interruption et sous diverses formes (prison, camp, exil intérieur, assignation à résidence) depuis 1982. Il est actuellement en résidence surveillée dans le Monastère Zen Thanh Minh à Ho Chi Minh Ville, sous l’étroite surveillance de la police, sans aucune raison officielle. Les délégations diplomatiques sont en général autorisées à le rencontrer, en revanche, les bouddhistes vietnamiens sont la plupart du temps empêchés ou dissuadés de lui rendre visite. Ces derniers mois, de fortes pressions sont exercées par les autorités, parfois par le biais de ses proches, pour qu’il accepte d’être transféré dans le nord du pays ou dans un établissement de l’Église bouddhiste officielle (Sangha Bouddhiste du Vietnam), ce qui aggraverait encore son isolement. M. Võ Văn Ái a demandé au Conseil des Droits de l’Homme de presser le Vietnam de libérer Thích Quãng Độ.

La bouddhiste Hòa Hảo Trần Thị Thúy a été arbitrairement condamnée à 8 ans de prison, en 2011, pour « activités visant à renverser l’administration du peuple » (article 79 du Code pénal), en fait pour son engagement en faveur des droits à la terre. En prison, les autorités pénitentiaires lui avaient administré des médicaments qui avaient gravement affecté sa santé mentale. Aujourd’hui, elle souffre d’une tumeur de l’utérus, diagnostiquée en prison, et d’énormes furoncles. Elle ne peut plus marcher sans assistance. Les autorités lui dénient tout soin médical et refusent même de lui transmettre les médicaments envoyés par sa famille. Elle est actuellement incarcérée à An Phước, province de Bình Dương.

Le pasteur luthérien Nguyễn Công Chính a été arbitrairement condamné à 11 ans de prison, en 2012, pour avoir « porté atteinte à l’unité nationale » (article 87 du Code pénal), en réalité pour avoir pratiqué sa foi et agi en faveur de la liberté religieuse. Selon sa femme qui ne peut lui rendre visite que tous les deux mois et l’a vu le 10 février 2017, son état de santé s’est fortement dégradé. Ses mains et ses jambes sont tout enflées et il ne reçoit aucun soin pour son hypertension, sa sinusite ou son arthrite. Il est actuellement détenu dans le camp de Xuân Lộc, province de Đồng Nai.

M. Võ Văn Ái a jugé qu’outre le caractère arbitraire et infondé de ces détentions, le refus de prodiguer des soins médicaux appropriés à ces prisonniers les contrevient à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants que le Vietnam a ratifiée en 2015.

M. Võ Văn Ái a enfin dénoncé les attaques contre les défenseurs des droits de l’Homme et les religieux, signalant le cas du pasteur Nguyễn Trung Tôn. Le 27 février dernier, alors qu’il se rendait à la rencontre de victimes de violences policières de la province de Quảng Bình, il avait été enlevé par des voyous à la solde de la police ou des policiers en civil, transportés dans la province voisine, battu, dépouillé puis attaché et abandonné dans la forêt. Par le passé, Nguyễn Trung Tôn avait déjà été condamné, en 2011, à 2 ans de prison pour « propagande contre la République Socialiste du Vietnam » (article 88 du Code pénal) et, ces dernières semaines, subissait harcèlements et intimidations policières.

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