PARIS, 12 mai 2017 (VCHR) – Les membres de l’Église Bouddhique Unifiée du Vietnam (UBCV) et de son affiliée, le Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse (Gia định Phật tử Việt Nam) ont été l’objet de menaces, harceèlements et interrogatoires de la part de la police alors qu’ils organisaient les célébrations du Vesak (Anniversaire du Bouddha) dans l’ancienne capitale de Huế, dans le Centre du Vietnam.

« Pour tous les Bouddhistes du monde, le Vesak est une célébration de la paix et de la joie. Malheureusement au Vietnam, il est marqué par les harcèlements et la discrimination », a dit le Président du VCHR Võ Văn Ái. « Le gouvernement prétend avoir accompli des progrès en matière de liberté religieuse avec l’adoption d’une récente loi, mais sur le terrain, la répression religieuse reste inchangée ».

Lê Công Cầu, Secrétaire-général de l’UBCV et chef du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse, a envoyé un rapport au Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme (VCHR) où il décrit toute une série de restrictions posées par la police, les interrogatoires et les menaces proférées contre les bouddhistes de l’EBUV à l’approche du Vesak, en particulier dans le district de Phú Vang à Huế, où l’EBUV est fortement implantée.

Le 28 avril 2017, la Sécurité a convoqué pour interrogatoire au quartier général de la police de Phú Vang deux dirigeants du Mouvement Bouddhiste de la Jeunesse (MBJ), Ngô Đức Tiến et Nguyễn Văn Đê, tous deux membres du Comité Central du MBJ. Elle a menacé de les placer en détention et les a prévenus (a) que l’EBUV était une organisation illégale, (b) que participer aux activités de l’EBUV constituait une violation de la loi, (c) qu’ils devaient quitter l’EBUV et (d) qu’ils ne devaient pas assister aux cérémonies du Vesak de l’EBUV à la Pagode Long Quang à Huế. Les deux jeunes dirigeants ont protesté en disant qu’il n’y avait aucun texte formel interdisant l’EBUV et que, par conséquent, elle restait une organisation légitime. Résistant à la pression policière, ils ont refusé de signer une déclaration où ils auraient reconnu leurs « méfaits ».

Le 4 mai 2017, Lê Công Cầu a été convoqué par la Sécurité pour une « session de travail » (interrogatoire) qui a duré toute la journée. Il y a subi des pressions afin qu’il mette fin à son implication dans l’EBUV « illégale ». Par ailleurs, durant la période qui a précédé le Vesak, la police et les cadres locaux se sont rendus au domicile des bouddhistes pour les dissuader d’assister aux cérémonies du Vesak organisées par l’EBUV.

Les ingérences de la police dans les célébrations d’une fête religieuse traditionnelle comme le Vesak démontrent les profondes contradictions de la politique religieuse au Vietnam. Le gouvernement prétend avoir amélioré la protection de la liberté religieuse, notamment avec l’adoption d’une nouvelle Loi sur les Croyances et la Religion qui doit entrer en vigueur en janvier 2018, mais il impose sur les communautés religieuses un strict contrôle et réprime arbitrairement les groupes non-enregistrés comme l’EBUV. L’an dernier, dans une Lettre Ouverte destinée à l’Assemblée Nationale vietnamienne, 54 organisations religieuses ou de la société civile à l’intérieur et à l’extérieur du Vietnam ont demandé la révision de la nouvelle loi qui pose « des restrictions inacceptables au droit à la liberté de religion ou de croyance et aux autres droits de l’Homme » et est « en contradiction avec l’esprit et le principe du droit à la liberté de religion ou de croyance ».

Le Patriarche de l’EBUV Thích Quảng Độ a dit très clairement que l’EBUV ne demanderait pas à s’enregistrer auprès du régime communiste, estimant d’une part que l’EBUV possédait de longue date un statut tout à fait légitime et, d’autre part, que l’obligation d’enregistrement constitue une violation du droit international.

En effet, l’ancien Rapporteur spécial de l’ONU sur la liberté de religion ou de croyance Heiner Bielefeldt avait souligné après sa visite au Vietnam que « le droit à la liberté de religion ou de croyance est un droit universel qui ne peut jamais être « créé » par des procédures administratives. Ce serait plutôt l’inverse : l’enregistrement devrait être une offre de l’État et non une exigence légale obligatoire ».

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